Que faire en cas de copropriété en difficulté ?

Une copropriété en difficulté peut lancer une procédure d’alerte afin de rétablir sa situation financière. Le syndic, le conseil syndical et un mandataire ad hoc désigné par un juge travaillent en collaboration afin d’éviter une aggravation de la situation.
Sophie NOARO - Responsable du contenu
Sophie NOARO
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Publié le :
24 novembre 2022
Temps de lecture :
7 min

Copropriété en difficulté

Une copropriété est en difficulté dès lors que l’équilibre financier du syndicat des copropriétaires est fortement compromis ou qu’il est dans l’incapacité d’assurer la conservation de l’immeuble ainsi que la sécurité des occupants. Afin d’anticiper cette situation, le syndic se doit de déclencher une procédure dès que la situation financière de la copropriété est compromise.  

Les trois procédures prévus par la loi sont la procédure d’alerte, la procédure applicable au copropriété en difficulté, et l’état de carence. Ainsi on peut se demander quels sont leurs objectifs et leurs conséquences. Explications !

Qu’est-ce que la procédure d’alerte ?

Selon l’article 29 de la loi du juillet 1965, une procédure d’alerte permet d’analyser les difficultés rencontrées par la copropriété et de faire appel à un mandataire ad hoc pour redresser la copropriété. 

La procédure d’alerte est déclenchée selon la situation à la date de clôture des comptes de la copropriété, à savoir :

  • 25 % d’impayés dans les copropriété de moins de 200 lots 
  • 15% d’impayés dans les copropriétés de plus de 200 lots

Dans ce cas, le syndic doit en informer le conseil syndical et saisir le juge afin qu’il désigne un mandataire ad hoc.

Dans le cas où le syndic ne réagit pas sous un mois, le président du Tribunal de grand instance (TGI) peut être saisi par :

  • Le président du conseil syndical
  • Les copropriétaires représentant au moins 15% des voix du syndicat.
  • Les entreprises ou fournisseurs dont les factures restent impayées depuis 6 mois. Pour cela, ils doivent avoir envoyé au syndic un commandement de payer resté infructueux. 

Qu’est-ce qu’un mandataire ad ’hoc ?

Un mandataire ad hoc est désigné par le président du TGI. Il s’agit en réalité d’un administrateur judiciaire. Néanmoins, le mandataire ad ‘hoc désigné ne doit pas au cours des 5 dernières années : 

  • Avoir perçu directement ou indirectement un paiement de la part du syndic, du syndicat des copropriétaires ou des créanciers à l'origine de la procédure.
  • S'être trouvé en situation de conseil du syndic, du syndicat des copropriétaires ou des créanciers concernés,
  • Avoir un intérêt dans le mandat qui lui est donné,
  • Avoir fait l'objet d'une décision de radiation ou de retrait des listes.

Par ailleurs le juge détermine la mission et la rémunération du mandataire qui est fixée l'arrêté du 8 octobre 2015 ainsi que la répartition des frais selon l’origine de la saisine. En effet les frais peuvent être partagés entre les copropriétaires, entre le syndicat des copropriétaires et le syndic ou encore entre les créanciers.

A noter toutefois, qu’un mandataire ad hoc ne peut pas être désigné comme syndic à la fin de la procédure

Quelles sont les missions du mandataire ad ‘hoc ?

Le mandataire doit dans un délai de 3 mois renouvelable une seule fois, présenter un rapport complet à savoir :

  • L’origine des problèmes : analyse de la situation financière de la copropriété et de l’état de l’immeuble
  • Les solutions requises afin de rétablir l’équilibre financier et assurer la sécurité de l’immeuble. 

Ainsi, le syndic doit fournir au mandataire ad hoc tous les documents nécessaires au bon déroulement de sa mission. 

Ainsi à la suite de son compte rendu, le syndic devra inscrire les projets de résolution nécessaires à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale. 

Le syndic doit convoquer une AG dans les 6 mois après la remise du rapport sauf mesures d'urgence préconisées par le mandataire ad hoc. Dans ce cas, l’AG devra être convoquée dans les 3 mois. 

Bon à savoir : L’assemblée générale peut mettre à l’ordre du jour la désignation d’un administrateur provisoire afin d’enclencher la procédure applicable aux copropriétés en difficulté. 

Quelle est la procédure applicable aux copropriété en difficulté

L’objectif de cette procédure est de rétablir le fonctionnement normal de la copropriété. C’est pourquoi, un administrateur provisoire sera désigné afin de remplacer le syndic. Il s’agit donc d’une personne indépendante qui va intervenir dans la gestion de la copropriété. Elle va analyser la situation et tenter de trouver des solutions de redressement. Sa mission est complémentaire au mandataire ad hoc. 

Ainsi un mandataire intervient dès lors que l’équilibre financier de la copropriété est gravement compromis entraînant l’impossibilité d’assurer la conservation de l’immeuble.

Comme dans la procédure d’alerte, le président du TGI peut être saisi par :

  • Les copropriétaires représentant ensemble 15 % au moins des voix du syndicat,
  • Le syndic,
  • Le Procureur de la République.

Quels sont les pouvoirs et les missions de l’administrateur provisoire ?

Le juge peut à tout moment modifier, prolonger ou mettre fin à la mission de l’administrateur provisoire.

Il doit durant sa mission prendre les mesures nécessaires au redressement de la copropriété. Il se substitue au syndic et donc il obtient tous les pouvoirs afin d’exécuter sa mission. Le mandat du syndic cesse donc de plein droit et sans indemnité dés lors que l’administrateur est désigné.

Bon à savoir : la durée de la mission d’un administrateur provisoire ne peut être inférieur à 12 mois.

Ainsi, l’administrateur provisoire peut établir un plan d’apurement des dettes défini par les articles 62-15 et suivants du décret du 17 mars 1967. Il peut être d'une durée maximale de cinq ans et doit  comporter un échéancier de versements auprès des créanciers du syndicat.

Que se passe-t-il à la fin de la mission de l’administrateur provisoire ?

L’administrateur provisoire doit rendre compte par écrit de sa mission au président du TGI au moins une fois par an conformément à l'article 62-11 du décret de 1967.

Ainsi, il dépose son rapport au greffe. Ensuite ce rapport sera adressé aux parties suivantes :

  • Le procureur de la République, 
  • Le syndic désigné, 
  • Le président du conseil syndical.

A noter que la situation financière ne permet pas de réaliser les travaux nécessaires à la conservation et la mise en sécurité de l’immeuble, le juge peut le placer sous administration provisoire renforcée conformément aux articles 62-30 et suivants du décret du 17 mars 1967 modifié par le décret n°2015-999 du 17 août 2015.

Qu’est ce que la procédure en cas d’état de carence ?

Un immeuble est en état de carence dès lors que le syndicat des copropriétaires rencontre des difficultés financières qui ne permettent plus d’assurer la conservation de l’immeuble mais également la sécurité des occupants. Cette procédure peut amené à une expropriation de l’immeuble. (articles L. 615-6 à L. 615-8 du code de la construction et de l'habitation)

Afin de dénoncer cette situation le président du TGI peut être saisi par les parties suivantes :

  • Le maire de la commune 
  • Le représentant de l'État dans le département,
  • Le syndic,
  • L’administrateur provisoire de la procédure des copropriétés en difficultés,
  • Les copropriétaires représentent 15 % au moins des voix du syndicat.

Le juge devra alors désigner un ou plusieurs experts chargés de constater l’importance de la situation dans laquelle la copropriété se trouve. 

Les experts devront rendre un rapport dans un délai de 3 mois, renouvelable une seule fois. A la suite de ce compte rendu, le juge peut déclarer l’état de carence de l’immeuble ayant comme conséquence l’expropriation de l’immeuble.

Quels sont les objectifs de l’expropriation ?

Ainsi le maire ou le président de l’intercommunalité présente un projet simplifié d’acquisition publique lors d’une assemblée. Ce projet a pour objectif soit :

  • La réhabilitation aux fins d'habitat ou d'un autre usage,
  • La démolition totale ou partielle de l'immeuble concerné.

Ce projet définit l’évaluation du coût de l’expropriation et le plan de relogement des occupants conformément aux articles L. 314-1 et suivants du code de l'urbanisme.

 
Une fois l’expropriation validé, le représentant de l’État dans le département établi un arrêté afin de :

  • Procéder à la déclaration d'utilité publique du projet d'acquisition,
  • Déclarer cessibles les immeubles ou parties d'immeubles
  • D’indiquer la collectivité publique au profit duquel est poursuivie l'expropriation,
  • Fixer le montant de l'indemnité provisionnelle allouée, qui ne peut être inférieure à l'évaluation effectuée par le service chargé des domaines,
  • Déterminer la date à laquelle il pourra être pris possession des immeubles. 

L’arrêté sera alors notifié aux différentes parties concernés, à savoir : 

  • Le syndicat des copropriétaires,
  • L’administrateur provisoire,
  • L'auteur de la saisine,
  • Le maire de la commune 
  • Les propriétaires 

La notification d’expropriation est aussi affichée en mairie et sur la façade de l’immeuble.

Quelles sont les conséquences d’une expropriation ?

Le représentant de l’État dans le mois suivant l’arrêté de péril doit poursuivre la procédure d’expropriation dans les conditions prévues par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. En effet, les modalités de transfert de propriété et l’indemnisation des propriétaires sont soumises aux dispositions du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

La valeur des biens expropriés tient compte des travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble indiquée dans l’expertise. La loi Alur précise que l’indemnité d’occupation versée aux propriétaires occupants est assimilée à un loyer pour ouvrir droit aux allocations logements. 

 Copropriété en difficulté : Attention aux impayés !

Afin d’anticiper et éviter que la copropriété se retrouvent en difficulté, syndic et copropriétaires ne doivent pas attendre avant d’engager une procédure d’alerte et l’intervention d’un mandat ad hoc.

En effet, le syndic ne perd pas ses pouvoirs mais travaille en collaboration avec le mandataire afin de rétablir la copropriété. 

C’est pourquoi, la procédure doit être déclenchée dès que le seuil d’impayé est franchi. À noter que les sommes impayées dans le mois précédant la date de clôture de l’exercice ne sont pas à prendre compte dans le calcul du seuil des charges dues. 

Copropriétaires, n’hésitez pas à contacter le syndic en cas de difficultés de paiement afin de prévoir un échéancier. En cas de litige, demander conseil à des avocats spécialisés en droit immobilier !

Mise à jour le : 24 novembre 2022
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